jeudi 17 avril 2008

La leçon de Pedro le perce-oreille

Le petit forficule se frottait les antennes depuis quelques secondes pour se chauffer les idées peut-être, ou pour les contraindre de peur qu'elles n'éclatent méchamment. Parfois sa langue débordait et lavait sa tête triangulaire aux yeux noirs proéminents pour éliminer un insecte des insectes, peut-être, ou une poussière plus méchante que les autres. C'était Pedro, Pedrito ou Pedrolito comme je l'appelais parfois. Petit mais vieux et sage car il avait fait la guerre d'Espagne et avait combattu les franquistes jusqu'à en perdre une patte, une de celles de derrière qui lui servait notamment à se gratter l'emplacement que nous appelons "le dos".

Pedro me regardait du coin de l'oeil. Il longeait le calendrier accroché au mur derrière l'ordinateur, en laissant croire qu'il ne m'avait pas vu. Je m'écriais.

- « Je t'ai vu Pedrito le perce-oreille ! Je ne sais pas pourquoi mais je sens que tu me fais la gueule depuis quelques jours" .

Pedro s'arrêta net au milieu du calendrier, juste entre les colonnes de mai et de juin. Je suspendis quelques secondes la danse de mes doigts sur le clavier de mon Macintosh et lui dis.

-"T'es juste au dessus du printemps ; soi heureux mon vieux Pedrito !"

L'insecte croisa ses deux pinces d'un geste convulsif à la manière d' un vieux ciseau rouillé et me regarda droit dans les yeux.

- «Ne ris pas, tu sais bien à quoi je pense ! Me répondit-il

- Allez raconte, comment saurais-je à quoi tu penses ? Lui dis-je.

-Ton texte là : «l'exemple du pire en matière de démocratie». Franchement, tu te prends pour quoi ?

-Quoi ? Quoi ? Je n'ai pas pour habitude de me moucher avec du vinaigre ! Lui assenai-je.

- Que dis-tu ? Moucher... avec du vinaigre ?

- Euh ! Oui !... C'est une expression.

- PFFOUAAAH !Ah ! Ah ! Ah ! s'esclaffa-t-il soudainement. Tu dois confondre avec l'expression «ne pas se moucher du pied (ou du coude)» ou sinon «prendre les mouches avec du vinaigre»...

- Mince, j'ai dû confonder.

- Confondre... Bon bref, pour revenir à ce texte, on en avait pourtant longuement discuté, mais tu n'en fais qu'à ta tête, pauvre Combineto !

- Je t'ai déjà dit de pas m'appeler comme ça, et puis j'aime pas qu'on m'infantilise !

- Tu aurais dû enlever le dernier paragraphe qui ne sert à rien. Et puis «crypto-fasciste», franchement.... Les fascistes, c'était une autre époque. On ne peut pas comparer ce qui n'est pas comparable. Invente des mots même laids pour exprimer tes idées au lieu de faire du recyclage.

- C'est bien pour ça que j'ai mis «crypto» devant, pour tempérer.

- Crypto ! crypto ! t'as entendu ce mot deux fois et il faut que tu le places ma parole ! Dit-il d'un air que je jugeais plutôt moqueur.

- Cest même pas vrai, m'écriai-je outré.

-Et t'as réussi à placer Mussolini ; pauvre Combinetto, tu connais pas son histoire. Tout ce que tu en sais, c'est trois lignes que tu as lu sur un site internet réalisé par un gosse de 6 ans.

- C'est même pas vrai, j'ai aussi regardé le dictionnaire Larousse Illustré spécial junior. Ecoute, voilà aussi ce que j'ai lu sur le Petit Robert des noms propres : Mussolini s'inscrivit au Parti-Socialiste au début du vingtième siècle. Il devint instituteur, comme (1)Perez, l'autre petit Robert de Mauléon qui a tout du dictionnaire, les mots et le papier en moins. Il enseigna deux ans, bon, vachement moins que Robert l'instituteur. Vers 1943 alors qu'il fut placé par Hitler à la tête d'une «république sociale italienne», le Duce alias Mussolini fit fusiller plusieurs des membres du grand conseil qui avaient voté contre lui - écoute bien Pedrolito - dont son gendre, le comte Ciano. Tu te rends compte ce quoi a échappé Mad Max Dalier (2) ? Et j'ajoutais. Lors de l'effondrement du Reich, Mussolini tenta de fuir en Suisse revêtu de l'uniforme allemand (pour passer inaperçu probablement !) mais il fut arrêté et exécuté par un détachement de partisans...Je te le donne Emile ! De partisans COM-MU-NISTES. Car! car, Mussolini détestait les communistes vachement beaucoup. Que de coïncidences n'est-ce pas? Ah! ah! ça t'en bouche un coin Pedrito l'incrédule ?

- Mon pauvre Combino, je suis dépité d'entendre un raisonnement comme le tien. Tu prends trois phrases qui arrangent ton raisonnement sur un dictionnaire pour enfants de 3 à 6 ans et tu en sors une écrivasserie sans forme ni fond.

-Ah! Bon ! Tu crois vraiment que c'est nul ? demandai-je.

-Nul de chez nul répondit-il.

- Bah ! de toute façon qui aura lu ce papier? Trois pelés, un tondu ? Pour changer d'air j'ai soudain envie d'écrire un truc sur l'existencialisme en Soule et le rapport de l'être et du coefficient de consistance du rallye des cîmes dans l'hydrotropisme des images mnésiques immédiates en opposition avec la vision post castratrice ou dystonique de Jean-Pierre Mirande.

- Allez va Combinetto ! Va ! et n'oublie pas... hasta la victoria siempre y no pasaran!

- Tu l'as dit bouffi, no Patxaran (3)
  1. Perez Robert était tête de liste de la liste "Mauléon en Avant" en 2001. Les électeurs l'ont renvoyé bon dernier DE L'ENSEMBLE DES DEUX LISTES.
  2. Pour ceux qui ne connaissent rien de Mauléon, Max Dalier est le gendre de Robert Perez. Il est 1er adjoint du maire de Mauléon actuel.
  3. Pour ceux qui n'habitent pas le Pays-Basque, le Patxaran est un digestif, une liqueur Basque à base de prunelles.
Le 01 janvier 2003

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Voilà un texte que j'aurais dû mettre dans mes "Pensements". J'ai jugé qu'il était trop ésotérique. En fait j'adore ce texte mais j'y parle d'un Robert, à Mauléon que personne ne connait sauf quelques Mauléonnais, j'y parle d'un évènement dont tout le monde se fout sauf quelques mauléonais. En fait c'est un beau texte qui sert un évènement misérable et sans intérêt. Mais que voulez-vous l'inspiration de ce commande pas. Les grands penseurs sont inspirés par les grands sujets, les petits penseurs par les petits sujets, c'est comme ça.

3 commentaires:

Kolova a dit…

Lurbeltz,
ce sont les beaux textes qui font l'histoire... et qui embellissent la pensée des Humains...

Merci

(même si je ne comprends rien à vos histoires loco-locales ! ;o))

Lurbeltz a dit…

Oui, c'est exactement ce que je dis à la fin du texte en guise d'explication. J'adore ce texte mais en dehors de quelques initiés, personne ne peut vraiment comprendre.
Tu as lu "Jeannette & Porfirio" que j'ai mis sur le blog il y a quelques jours ?

Kolova a dit…

Evidemment...

Je me régale, même si je ne commente pas toujours...

Je suis une très fidèle lectrice, mais, attention, EXIGENTE !!!

:o)