mardi 8 avril 2014

Herriak bizi behar dü! Le pays doit vivre !

J'avais envie de répondre à Mathias Davant. Espérant en cela que le Mathias d'après, ne sera plus celui d'avant (ouarf ! mdr !) En même temps, j'ai passé cette période du je-réagis-instantanément-aux-machins-de-l'actu-je-sais-pas-trop-pourquoi-d'ailleurs. Je laisse passer les évènements. je réagirai plus tard, me dis-je... Là, je suis en voyage d'enfer. Plus tard, j'écrirai un bouquin et je prendrai les choses à froid... Ou pas. Bon en même temps, j'ai déjà écrit un truc qui répond à Mathias. le voilà ci-dessous. Il parle de la peur, cette peur que je comprends tellement bien. Moi-même, je ressens la peur pour les choses visqueuses et j'ai une peur viscérale pour les cravates même bien nouées à fortiori si celles-ci sont visqueuses. On a toutes et tous la peur, pour ci ou pour ça. Et c'est curieux comment cela résonne particulièrement avec ce que je lis actuellement...  Le sub, ci-des-sub, fait un inventaire des peurs qu'on peut avoir parfois :

" Supposons qu'une des peurs les plus élaborées est la peur de ce qui est autre, de ce qui est différent, c'est-à-dire ce que nous ne connaissons pas.
j'en fais juste un inventaire rapide, en espérant pouvoir y revenir par la suite :
- La peur de genre. Mais pas seulement des femmes à l'égard des hommes et vice versa, la peur aussi des femmes à l'égard des femmes et des hommes à l'égard des hommes.
- La peur des génération. Entre personnes âgées, adultes, jeunes, petits garçons et petites filles.
- La peur de ce qui est autre. A l'égard des homosexuels, lesbiennes, transsexuels et d'autres réalités qu'il ne suffit pas d'ignorer pour qu'elles cessent d'exister.
- La peur identitaire ou de race. Entre Indiens, Métis, compatriotes, étrangers.
La liberté que nous voulons devra vaincre aussi ces peurs-là."

Sources : Sous commandant Marcos, saisons de la digne rage.


Herriak bizi behar dü ! Le pays doit vivre !

Le 15 septembre  2008

Texte paru en mai 2009 dans le journal « L’âge de faire »
N°31 pour un dossier spécial  : « L’union fait la force en Pays-Basque. »

Ce texte est un témoignage qui se veut avant tout utile. Il est celui d'un non Basque, non bascophone, non abertzale, non nationaliste et non patriote. Il s'adresse à ceux qui lèvent un regard méfiant sur cette idée qui devrait être une évidence : Le pays doit vivre.
J'écoutais un musicien de Massilia Sound System qui disait ne pas être occitan, car né en Italie, mais qui se disait occitaniste. De la même manière, je ne peux pas dire que je sois basque ou eüskaldün (celui qui parle l'Eüskara) malheureusement pour moi et pour Eüskal-Herri. Par contre, je me sens bascophile ou basquisant.
Il est possible de laisser un espace à ceux qui pensent qu'il faudrait absolument parler basque, être né ici et autres options qui seraient obligatoires pour la défense de la cause.

Il me paraît tout à fait normal que les basques veuillent leur indépendance. On peut se poser des questions et débattre de quelle indépendance et comment y arriver, bavarder sur la forme, jouer sur les mots et les concepts quand on parle d'indépendance ou d'autonomie. On peut disputer le nationalisme, la violence, discuter d’une éventuelle Eurorégion ou d'un département basque, mais on ne peut pas dénier à un peuple le désir profond de l'autodétermination.
Je comparerais cela avec la religion qui est une constante de tous les peuples du monde depuis le début de la civilisation. Trouvez-moi un peuple qui n'ait pas son explication sur le monde. De même que je trouve inutile la lutte contre le sentiment religieux, je trouve naturel que chaque peuple, même le plus petit, soit soucieux de l'intégrité et du respect qui lui est dû dans son territoire. Là aussi, on peut pérorer sur les nuances sémantiques qu'il y a entre les mots « religion », « spiritualité », « mysticisme », « croyance ». Ça ne change rien au fait que l'humain est une créature religieuse mais aussi scientifique, artiste, philosophe, politicienne, amoureuse de la culture héritée de ses ancêtres qu’il souhaite naturellement léguer à ses enfants. Ces différents domaines sont des outils qui doivent nous permettre de comprendre le monde et aucun n'est à prendre à la légère.

Je ne veux pas dire que tous les sentiments enracinés doivent être conservés dans le formol. Je dis qu'il y a des énergies initiales qu'il convient de maîtriser ou d’aménager. Au XlXème siècle, quelques héritiers de la tradition jacobine rêvèrent d'éradiquer la religion chrétienne. Jean Jaurès mit fin à ce débat en déclarant : « la France n’est pas schismatique mais révolutionnaire… », ce qui eut pour résultat la séparation de l'église et de l'Etat, c'est-à-dire, un aménagement. Evidemment, il convient de faire disparaître certaines énergies néfastes comme la guerre, l'exploitation industrielle des animaux, l'exploitation de l'homme par l'homme, la corrida, les mines anti-personnelles, la domination masculine, l'homocentrisme...

Pourquoi enlèverions-nous le sentiment universel d'être un peuple à part entière, aux Basques, aux Bretons et aux Corses ?  Pour quelles fallacieuses raisons ne mettrions-nous pas tout en œuvre pour que ces pays aient les moyens de vivre ? Que de nombreux Basques ne se sentent pas Français est quelque chose d'aussi naturel que le plancher qui craque lorsque l'on marche dessus. A nous de choisir le naturel que nous voulons.

Ma réflexion est actuellement en court de construction. Elle n'est pas aboutie, pas plus que pour de nombreux Basques qui auraient le « pedigree » idoine. Ne croyez pas qu'il suffise de parler l'Eüskara et d'être né ici pour reconnaître Eüskal-Herri. Ils sont combien ces basques à « pedigree idoine » qui disent qu'il faut maintenant parler l'anglais et que l'Eüskara est inutile dans notre société ?
Etre Basque est une chose ; le devenir est autre chose. J'aimerais paraphraser Simone de Beauvoir qui disait : «  On ne naît pas femme, on le devient » et dire à mon tour  « on ne naît pas Basque, on le devient  ».
Quand on vit en Eüskal-Herri, il y a beaucoup de choses à faire individuellement pour devenir Basque et pour reconnaître ce territoire. Mais le moindre, quand on ne se sent pas Basque, c’est d'arrêter d'avoir peur de le devenir. Qu'est-ce qu'un basquisant, un bascophile ? Cela peut être une personne étrangère au sujet, au pays, ne parlant pas le basque, n'étant pas née ici. En même temps il s'agirait de quelqu'un qui aurait levé toutes ses inhibitions face à la question basque et se serait libéré de ses sentiments de culpabilité, de susceptibilité et/ou de paranoïa pour reconnaître le fait que ce pays doit vivre.

Une fois cette barrière franchie, l'arbre de Gernika - libéré de la torture du bonzaï japonais dont les bourgeons sont soigneusement coupés chaque année - pourra pousser librement. Ce petit territoire compressé entre ces deux nations arrogantes que sont la France et l'Espagne pourra alors étendre ses branches naturellement dans cette Europe que nous devons appeler de nos vœux. 

Laurent CAUDINE

samedi 1 février 2014

Stop


Je sors de mon silence.
Je me mets à parler.
J'ai trouvé ce matin que le temps passait vite et que c'était notre faute.
J'ai trouvé que finalement c'était plutôt nous qui passions.
Stop.
Je m'arrête.
Je regarde passer cet océan de misère.
La pluie tombe pour moi et je m'arrête sur elle.
Je m'arrêterai sur le soleil, comme je m'arrête sur la pluie.
Je ne veux plus le temps des hommes. je veux le temps de lire, de dire, de rire, de frire.
Je ne veux plus le temps des Monômes glauques et taciturnes.
Je me relocalise.
Je m'arrête.
Je me souviens de demain et tout tremble.
Je me souviens de toi
Je me souviens d'une course au travers des bois
Des grandes flammes de mon adolescence.
Je m'arrête.
Il n'y a plus rien en moi pour nourrir l'économie
Il n'y a plus rien en moi pour nourrir les hommes.
Je voudrais partir en cavale.
Je me relocalise.
Je me sens seul, je me sens bien, je sens dans mes veines des flammèches de vipères.
Je me sens roder dans les terriers animaux, dans les arbres pourrissants d'insectes.
Je me sens sève sangsue, je me sens lever l'hymne de la nature.
Orties, ronces, vieux crapauds planqués dans d'horribles nurseries.
Stop