La compréhension (enfin !) de l’urgence environnementale s’accompagne d’une ignorance toujours plus grande des propositions que l’écologie-politique fait à la société depuis les années 1970, entre les premières vélorutions, les Amis de la Terre, les écrits d’Ivan Illich et le verre d’eau de René Dumont. La recomposition du paysage électoral apportera-t-elle du nouveau ? Nous sommes jeunes et impatient-e-s, nous préférons agir dès maintenant pour faire renaître une culture à proprement parler écologiste.
La révolte commence dans l’imaginaire
Travailler-consommer est un impératif majeur dans notre société. C’est surtout le fruit de l’imaginaire capitaliste sur lequel notre civilisation est basée. Il nous impose une façon unique de penser, de s’accomplir, bref d’exister. Mais il ne s’agit pas d’un horizon indépassable, puisque tous les imaginaires sont possibles pour construire une société. L’écologie-politique a pour ambition de ré-inventer une utopie émancipatrice pour tou-te-s.
Elle souhaite mettre fin à toute forme de domination : racisme, sexisme, (néo-)colonialisme, nationalisme… C’est que l’hétérogénéité de ces phénomènes sociaux n’est qu’apparente. Toutes ces formes d’oppression nous apparaissent indissociables de la domination de l’être humain sur son semblable (aujourd’hui par le capitalisme), elle-même inséparable de la domination de l’être humain sur la nature. L’écologie-politique mène ces deux combats de front.
L’autonomie à la base
L’une de ces dominations, et la moins mise en cause, est celle des Etats sur les peuples. L’élection a créé une classe politique qui s’auto-entretient et prétend nous représenter. Mais nous ne débattons plus. Les classes dominantes s’appliquent à ce que nous n’ayons plus que des idées préconçues qui guideront ensuite l’action politique. Aucun temps à consacrer à la vie de la cité, des médias manipulateurs, cela concourt à confisquer le pouvoir au peuple.
Sur la question environnentale par exemple, nous sommes tenu-e-s d’accepter la mise en place d’une gestion autoritaire, centralisée et technicienne des ressources naturelles et des contraintes qui l’accompagnent. La contrainte est subie à travers les politiques publiques (de l’énergie nucléaire, de l’agriculture…), la fiscalité « verte », etc. Ou bien elle est intériorisée avec le renforcement d’une « éco-citoyenneté » bien-pensante. N’est-ce pas seulement ralentir la vitesse à laquelle on dégrade l’environnement, pour se donner bonne conscience ?
L’écologie-politique passe par une véritable démocratie directe. Elle n’accepte pas que le désastre environnemental justifie un renforcement de l’autorité. L’autonomie et la liberté, qui sont au coeur de notre pensée, nous permettent non seulement de garder notre humanité mais aussi de construire une société écologique.
Remettre l’économie à sa place
Le fonctionnement de la société productiviste nous impose le travail comme rouage central de notre vie : organisation de notre temps, éducation, situation et reconnaissance sociale, accès aux besoins vitaux comme à ceux créés artificiellement.
Ce travail fonctionne sur des relations de domination. C’est donc une activité imposée, aliénante, spécialisée, contrainte par un système extérieur. Plutôt que d’être partagées, les tâches les plus pénibles sont peu rémunérées et réservés à une population mise à la marge.
Ce travail aliénant, nous le refusons. Nous lui préférons l’activité autonome et librement choisie, dans laquelle plaisir, émancipation et reconnaissance de chacun s’équilibrent avec satisfaction des besoins de tou-te-s. Pour répondre à ces besoins, remettons l’économie à sa place : c’est simplement la production et la répartition des richesses et ressources, à ne pas confondre avec un dogme considérant la croissance comme un but en soi.
La prédominance de cette vision totalisante de l’économie engendre des désastres sociaux et environnementaux que les dominants tentent de résoudre par des solutions techniques, sans remettre en cause nos modes de vie et de production. De surcroît, une croissance infinie, impossible sur une planète aux ressources finies, repose en grande partie sur l’exploitation des pays du Sud.
L’écologie-politique, au contraire, invite à une relocalisation de la production, et de la décision collective qui doit l’accompagner. Cette démarche permet de décider localement, démocratiquement et en toute connaissance de ce que l’on produit et comment, en fonction des besoins réels, des ressources disponibles et des possibles nuisances.
Graines d’alternatives
L’écologie-politique s’oppose aux violences physiques, psychologiques et symboliques : violence militaire internationale exportée, explosion des inégalités de pouvoir et de conditions socio-économiques, imposition d’un modèle de bonheur marchand. La dénégation du conflit, de la contestation, le refus de laisser place à la minorité et à l’« anormalité » sont autant de violences que nous rejetons.
Le conflit est humain, il résulte de l’altérité. Réhabilitons le conflit, son expression et sa régulation. Moteur de notre action collective, il est un point essentiel de la démocratie.
La jeunesse, notamment, ne doit pas réprimer son esprit critique. Elle est porteuse d’un regard nouveau, conciliant curiosité, convivialité et enthousiasme. Elle est une force indispensable à la construction d’une société écologique. Cette force doit rester indépendante des pouvoirs et des bureaucraties, afin de conserver ses qualités intrinsèques pour participer à l’essor de l’écologie-politique.
Et après ?
Nous n’appelons pas à la formation d’une nouvelle organisation centralisée, qui épuiserait nos énergies et effacerait notre diversité. Mais l’écologie-politique risque, sous les coups de boutoir du développement durable à la mode et du capitalisme « vert », de voir sa grille d’analyse oubliée au profit de celles, réductrices à nos yeux, de l’extrême-gauche traditionnelle ou de la simplicité volontaire. Elle a besoin, pour gagner en visibilité, d’être portée plus fortement que par les groupes atomisés dont nous faisons partie. A nous de créer un espace propre à l’écologie-politique ; réseau ou « désorganisation », cela dépendra de nos envies communes.
Appel initié par des jeunes se reconnaissant de l’écologie-politique, parlant en leur nom propre et militant dans les groupes (par ordre alphabétique) : Chiche ! jeunes écolos alternatifs solidaires, Déboulonneurs, EcoRev’, Fac verte, Groupe décroissance de Lille, Jeunes alternatifs, Jeunes verts, Le Pas de côté (groupe décroissance de Bordeaux), Mouvement de la paix, Mouvement rural de la jeunesse chrétienne (MRJC), Rêvolutives, Souris verte Picardie, Sud-Solidaires, Vélorution !, Virage-énergie en Nord Pas-de-Calais… et toi ?
ecologie-politique(a)ouvaton.org
http://ecologiepolitique.wordpress.com
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