jeudi 8 avril 2010

Sorcellerie

J’ai lu deux livres coup sur coup sur l’histoire des procès en sorcellerie en 1609 dans le Labourd. Celui de Claude Labat « Sorcellerie ? Ce que cache la fumée des bûchers de 1609 » et « Le solstice des sorcières » de Gratianne Hastoy. Pour ce dernier, je passe rapidement sur la forme. Ce livre ce veut être un roman historique. J’ai trouvé l’écriture une peu ampoulé par moment et le roman un peu fade.
Celui de Claude Labat est un essai. Comme le titre l’indique, il met en doute l’idée qu’il y ait eu des sorcières et de la sorcellerie en Pays-Basque, tel qu’on l’entend dans l’imagerie populaire. Surtout il exprime le fait que cette chasse aux sorcières a été mise en place sur l’ordre d’Henri IV pour des raisons religieuses et politiques. « Henri IV veut asseoir son pouvoir de ce côté de la frontière en faisant un coup d'éclat, pour impressionner la puissance espagnole et ramener un «ordre» qu'il juge défaillant dans notre province en confortant par la même occasion la place de certains parlementaires. » (Sources : Anna Carrillo sur le JPB)
Ce que me marque profondément dans cette histoire, c’est que Pierre de Lancre, nommé par le roi à la tête d’une commission d’enquête, tout en n’étant pas de l’église utilise une rhétorique qui est de la même facture. Aucune différence entre la morale de l’agent de l’Etat et celui de l’église. De Lancre parle du diable, stygmatise tout ce qui n’est pas dans la droite ligne de la culture et des valeurs dominantes. Même s’il semblerait que dans ce cas présent, de Lancre soit allé plus loin que l’inquisition elle même, en matière de terreur et de répression. de Lancre me fait fortement penser à Javert, l'inspecteur de police dans les misérables de Victor Hugo. Les deux croient dur comme fer à une réalité et ils sont à côté de la plaque.
J'en tire une conclusion. On a beau se dire non pratiquant, peut-être même athée, cela ne nous empêche aucunement d’être conditionné par une culture religieuse qui nous a modelé pendant des siècles et qui continue de le faire. Cela conditionne toute notre vision du monde et je ne crois pas que nous puissions échapper totalement à une culture de masse.
Il faut en profiter pour regarder comment nous fonctionnons aujourd’hui. J’ai en tête la chanson de Renaud « Société, tu m’auras pas ». Ben si elle t'a eu, elle nous a tous. Et malgré tous les radicalismes qu’on veut je pense qu’il est très difficile aujourd’hui d’avoir du recul sur notre culture, notamment celle liée à la technologie, aux images, au sacro-saint « progrès » au culte de la valeur travail, aux croyances. De la même manière, les basques du 17 ème siècle pouvaient difficilement sortir de cette vision hyper moraliste et manichéenne du monde.
Au moins, que l’exercice de replonger dans ces vieilles histoires puisse nous servir aujourd’hui à être un peu plus vigilant, résistant sur tout ce qu’on nous fait gober quotidiennement et qui nous paraît pourtant tellement évident. Quelle est la réalité, vers qu'elle réalité allons nous ? Qu'est-ce qui est utopie aujourd'hui et sera réalité demain ? Qu'allons décider de laisser à nos enfants, qu'allons nous garder, qu'allons nous jeter ?
Il faut faire des paris sur l’avenir, sinon l’histoire recommencera avec ses légions de moralistes et d’aménageurs de vie qui savent parfaitement ce qui est bon et mauvais pour vous.

5 commentaires:

Etienne H. BOYER a dit…

J'ai lu ce bouquin de Labat. Excellent au demeurant ;-)

Lurbeltz a dit…

Je voulais proposer ça comme sujet pour Bloga bloga.

jenofa a dit…

http://www.gouts-doux.fr/celebres22.html

jenofa a dit…

Et aussi:

Chanson d'Anne Sylvestre:


Une sorcière comme les autres

S'il vous plaît
Soyez comme le duvet
Soyez comme la plume d'oie
Des oreillers d'autrefois
J'aimerais
Ne pas être portefaix
S'il vous plaît
Faîtes vous léger
Moi je ne peux plus bouger

Je vous ai porté vivant
Je vous ai porté enfant
Dieu comme vous étiez lourd
Pesant votre poids d'amour
Je vous ai porté encore
A l'heure de votre mort
Je vous ai porté des fleurs
Je vous ai morcelé mon coeur

Quand vous jouiez à la guerre
Moi je gardais la maison
J'ai usé de mes prières
Les barreaux de vos prisons
Quand vous mourriez sous les bombes
Je vous cherchais en hurlant
Me voilà comme une tombe
Avec tout le malheur dedans

Ce n'est que moi
C'est elle ou moi
Celle qui parle
Ou qui se tait
Celle qui pleure
Ou qui est gaie
C'est Jeanne d'Arc
Ou bien Margot
Fille de vague
Ou de ruisseau

Et c'est mon coeur
Ou bien le leur
Et c'est la soeur
Ou l'inconnue
Celle qui n'est
Jamais venue
Celle qui est
Venue trop tard
Fille de rêve
Ou de hasard

Et c'est ma mère
Ou la vôtre
Une sorcière
Comme les autres

Il vous faut
Être comme le ruisseau
Comme l'eau claire de l'étang
Qui reflète et qui attend
S'il vous plaît
Regardez-moi je suis vraie
Je vous prie
Ne m'inventez pas
Vous l'avez tant fait déjà

Vous m'avez aimée servante
M'avez voulue ignorante
Forte vous me combattiez
Faible vous me méprisiez
Vous m'avez aimée putain
Et couverte de satin
Vous m'avez faite statue
Et toujours je me suis tue

Quand j'étais vieille et trop laide
Vous me jetiez au rebut
Vous me refusiez votre aide
Quand je ne vous servais plus
Quand j'étais belle et soumise
Vous m'adoriez à genoux
Me voilà comme une église
Toute la honte dessous

Ce n'est que moi
C'est elle ou moi
Celle qui aime
Ou n'aime pas
Celle qui règne
Ou se débat
C'est Joséphine
Ou la Dupont
Fille de nacre
Ou de coton

Et c'est mon coeur
Ou bien le leur
Celle qui attend
Sur le port
Celle des monuments
Aux morts
Celle qui danse
Et qui en meurt
Fille bitume
Ou fille fleur

Et c'est ma mère
Ou la vôtre
Une sorcière
Comme les autres

S'il vous plaît
Soyez comme je vous ai
Vous ai rêvé depuis longtemps
Libre et fort comme le vent
Libre aussi
Regardez je suis ainsi
Apprenez-moi n'ayez pas peur
Pour moi je vous sais par coeur

J'étais celle qui attend
Mais je peux marcher devant
J'étais la bûche et le feu
L'incendie aussi je peux
J'étais la déesse mère
Mais je n'étais que poussière
J'étais le sol sous vos pas
Et je ne le savais pas

Mais un jour la terre s'ouvre
Et le volcan n'en peut plus
Le sol se rompant
Découvre des richesses inconnues
La mer à son tour divague
De violence inemployée
Me voilà comme une vague
Vous ne serez pas noyé

Ce n'est que moi
C'est elle ou moi
Et c'est l'ancêtre
Ou c'est l'enfant
Celle qui cède
Ou se défend

C'est Gabrielle
Ou bien Eva
Fille d'amour
Ou de combat

Et c'est mon coeur
Ou bien le leur
Celle qui est
Dans son printemps
Celle que personne
N'attend
Et c'est la moche
Ou c'est la belle
Fille de brume
Ou de plein ciel

Et c'est ma mère
Ou la vôtre
Une sorcière
Comme les autres

S'il vous plaît
Faites-vous léger
Moi je ne peux plus bouger.

http://info-sorcellerie.blogspot.com a dit…

Merci!